dimanche 16 mai 2010

POLITIQUE-FICTION : QUE PREPARE WADE ?



Nul ne doit se faire d’illusion sur la volonté de Abdoulaye WADE d’imposer à notre peuple son scénario de dévolution monarchique du pouvoir. Pour y arriver, Wade ne reculera devant rien. C’est pourquoi il faut analyser, de façon systématique, chacune de ses initiatives dans le prisme de ses intentions réelles bien qu’inavouées. L’utilisation répétée des aspirations des femmes par un homme qu’elles ont porté au pouvoir mérite d’être disséquée. Ainsi la promesse de nommer une femme vice-présidente de la république, a pu lui permettre de faire passer sa réforme constitutionnelle. Wade savait qu’aucun parti ne pourrait s’opposer à une telle initiative dès lors que les femmes auraient mordu à l’hameçon. Il en fut ainsi. Depuis lors, il a changé d’avis et il garde le poste créé bien au chaud pour quoi ? Pour qui ?
De plus en plus de voix autorisées nous annoncent que Wade ne sera pas candidat en 2012. Il doit donc installer son dauphin à un poste stratégique d’ici là et lui donner les moyens de se faire élire en février 2012.
Or l’Assemblée Nationale actuelle n’est pas acquise au projet de Wade. Elle regroupe trop de PDS authentiques et n’acceptera pas le coup d’état silencieux du père. Il semble donc urgent de changer l’Assemblée Nationale et le Sénat si possible pour assurer la promotion en masse des « concrétistes » et envoyer « les vieux » à la retraite.
A y regarder de près, la loi sur la parité pourrait être une pièce maitresse du plan de Wade pour faire porter son dauphin au pouvoir.
Il s’agirait ici, sous le prétexte d’appliquer immédiatement la loi sur la parité, de dissoudre l’Assemblée Nationale dans les prochains mois pour organiser des élections législatives anticipées qui auront le double avantage de permettre de se débarrasser de la vieille garde légitimiste du PDS tout en aggravant les divisions de l’opposition qui pourrait avoir des difficultés à se mettre d’accord sur une stratégie concertée.
Enfin, la loi sur la parité devrait aggraver les conflits dans les rangs de l’opposition et permettre au Président de faciliter la promotion des militants (singulièrement des femmes) de la Génération du Concret dans la liste de la coalition présidentielle. Abdoulaye Wade pourrait ainsi installer un nouveau parlement (Assemblée Nationale et Sénat) avec des Présidents et une majorité de concrétistes acquis à son funeste projet monarchique.
La victoire de ses partisans à ces législatives anticipées devrait lui permettre de mieux préparer l’élection présidentielle et d’assurer à son candidat une victoire confortable.
Ce plan machiavélique de politique-fiction mérite de retenir l’attention de l’opposition en général et de Benno Siggil Senegal en particulier. Le peuple sénégalais ne pardonnera pas à l’opposition de se faire surprendre par Abdoulaye Wade alors qu’elle dispose aujourd’hui d’une majorité incontestable dans le pays.
Si les législatives anticipées sont organisées, quelle serait la meilleure stratégie pour l’opposition ? Une liste unique ou un nombre limité de listes. Cela nous ramène, d’une certaine manière au débat sur la candidature de l’opposition à la présidentielle. Mais pour les législatives, on sait que c’est une élection à un tour. Il faudrait donc, en toute logique, que l’opposition accepte d’avoir une liste unique si elle veut battre Wade aux législatives et faire échec une nouvelle fois à son projet.
L’hypothèse d’élections législatives anticipées n’a pas tellement retenu l’attention de l’opposition jusqu’ici. Elle doit aujourd’hui être envisagée très sérieusement et une riposte appropriée doit être élaborée d’ores et déjà pour éviter d’improviser à la dernière minute.
L’opposition doit se préparer, dès maintenant, à ce scénario de façon à éviter l’effet de surprise qui serait le meilleur allié du Président Wade.
Dans tous les cas, la définition d’une stratégie commune pour les législatives aurait l’avantage, même si Wade renonce à les avancer, de préparer l’opposition à une entente plus facile au lendemain de l’élection présidentielle de 2012 qui, dans ce cas, ne précéderait les élections législatives que de quatre mois.
Quant aux femmes de l’opposition et à toutes les citoyennes, elles doivent comprendre que tous les « cadeaux » de Wade aux femmes, du début de son mandat à nos jours, sont et restent des cadeaux empoisonnés. Ils ne sont pas destinés à leur assurer une participation réelle et effective à la gestion des affaires du pays mais plutôt à se servir d’elles pour conforter son pouvoir personnel et imposer au peuple sénégalais ses projets politiques. C’est pourquoi, les femmes devront faire preuve d’une circonspection extrême et d’une conscience politique élevée pour éviter les pièges de ce « féminisme de façade ». Les femmes sénégalaises, plus que toutes les autres couches de la population, sont les véritables victimes des politiques de spoliation et de corruption d’Abdoulaye Wade et de la conjoncture économique morose profondément marquée par un chômage endémique des jeunes et un coût de la vie insupportable pour les ménages.

Dakar, Mai 2010
Landing SAVANE